La mort du Lion…
C’est avec une curiosité certaine que j’ai assistéce samedi auxplaidoiriesentonnées par nos députés contre notre Premier Ministre (PM).Ce dernier s’est vu menacé, harcelé, dépecé, et torturé, dans un vacarme tonitruant. Il est resté figé et semblant apaisé au sein de l’Assemblée Nationale du Peuple.
Tous ces députés avaient aiguisé leurs couteaux en diatribes sibyllines, cachant leurs fusils aux lueurs trop blanches, y compris ceux qui voulaient le remercier, reconnaissant son courage..Guère plus, mais, car il y a eu toujours un mais.. Ce mais a été constamment assassin. J’en ai compté plus de cent.
Nous sommes tous patriotes; pas un chat en Tunisie n’a d’intention antipatriotique!… Pensez-vous Monsieur Jaziri vraiment, qu’il n’y a que des patriotes en Tunisie? Et ces milliers de Jihadistes encouragés pour aller en Syrie? Et ces mafieux qui arnaquent le pays? Ils seraient donc d’après-vous des patriotes?
Le sort du Lion, entouré par tant de chasseurs de sièges était scellé. Alors à quoi servait-il de venir se battre ?Peut-être pour une grande leçon de démocratie en Tunisie et dans tous les pays arabes. Il fallait bien inscrire quelque chose sur le Guinness en ce trente Juillet 2016.
Mais alors ce temps perdu! Oui en effet… Combien j’aurais souhaité que Notre Président de la République fit ce qu’il fit en silence…Dans son Palais.. A l’abri du temps qui vacille. Sans ce bruit de bottes qui a fait flancher le Dinar tunisien.. Et privé certaines ces régions de l’eau potable!.
Tout cela avec un PM entouré de ministres qu’il a nommés pourtant et qui se sont mis à lorgner son fauteuil. Il aurait pu en effet fracasser le mur, s’attaquer au plus gros des attaquants pour l’étrangler et montrer sa bravoure, et dire son différend avec la famille de BCE etdénoncer la corruption. Mais,craignait-ilceux qui voulaient le casser, le« marmader », s’il ne présentait sa démission ou s’il nous disait tout ?Et les couteaux les plus longs n’étaient-ils pas entre les mains-amies ? Le pire est que certaines critiques sont venues de ces ministres nommés par Essid.
Bien sûr qu’on entendit certains députés entonner les véritables raisons de ce départ tant souhaité par la Cour… Une corruption fulminante, des passe-droits à n’en plus finir, la crainte galopante du chemin d’héritage du pouvoir comme du temps de Ben Ali, l’indécision du PM face à de véritables fautes de certains de ses ministres, de certains gouverneurs et délégués…Mais en était-il le seul responsable ?
Ce PM s’est réellement jugé perdu.Plus aucune retraite possible, plus aucun recours de sauvetage. Alors il s'est assis pour la dernière fois au banc des Ministres…écoutant ces plaidoiries, des accusations d’incompétence.. Ainsi l’art de se faire respecter en politiquene consistait t’il forcément à éviter tant de tergiversations, de colères, de bouderies, et d’avares concessions …La patience peutdonner une chance sans recours à ce malheureux PM.Mais au fond de tout ça, cela fit naître une rancune rageuse, qui s'exprime sous forme de mépris et d'undésir tenace de prendre sa revanche ...
J’avais mal à mon pays.Les Tunisiens avaient quelque peu pitié pour ce Lion assis, on aurait dit un Loup pourtant,le regard fuyant, toutes griffes pliées et cachées, prenant certaines notes..Sa parole saccadée ne l’aidant point, on aura pourtant accusé ses mains d’être tremblantes face au dossier des Martyrs dont surtout Chokri Belaid et Mohamed Brahmi. Déchirures dites-vous ? Aucun n’a entamé son honnêteté… Mais en fin de compte c’était comme si cette qualité devenait une tare lourde à porter.. Car une fois ceci annoncé,dit, chaque député s’était permis de dépecer la carcasse de loup entreposée au premier rang. Et même le petit succès de Bengardane semblait revenir à un ministre de l’intérieur tapotant sur son pupitre..
A voir tant de rapaces que rien n’arrête
Seul le silence est grand pour un Lion honnête
Nous étions enragés de savoir qu’il y a six mois ces mêmes députés avaient voté pour Essid. Trois mois plus tard, tout basculait.. Mot d’ordre. La sentence était tombée. Ceux qui, au départ, l’avaient alors critiqué, se sont cette-fois abstenus de participer au vote mascarade.
Il en est ainsi dela mort du loup.. Essid l’a souhaitée… Il l’a affrontée avec courage.. Emportant avec lui tant de non-dit.. La chienlit, ce n’était pas lui.. Mais dans cette jungle terrible de politiciens, qui est mort réellement ce soir? Le Lion? le Loup? la morale?
Ahmed Dhieb
Professeur en Médecine