Académie militaire: La grande transformation (Album Photos et Vidéo)
Les 7 000 nouveaux bacheliers qui se bousculent au concours de l’Académie militaire savent qu’ils auront fait un bon choix pour une carrière d’avenir, au service de la patrie. Seuls 200 élèves officiers seront admis cette année. S’ajoutant au millier d’élèves officiers qui y sont déjà, ils seront encore plus chanceux que leurs prédécesseurs, depuis un peu moins de 50 promotions déjà sorties. Ils accéderont en effet à une prestigieuse institution d’enseignement supérieur militaire, d’emblée en pleine transformation. A tous les niveaux: centre universitaire, foyers, poste de commandement, équipements sportifs et socioculturels, filières et programmes d’enseignement, laboratoires techniques et de recherche, logistique et autres. Rien que la superficie gagne 28 ha supplémentaires, et sera ainsi presque doublée, passant désormais de 48 ha en 1976 à 76 ha, 43 ans plus tard. D’ores et déjà, c’est du solide, du très solide. Mais les futurs officiers seront ainsi encore mieux préparés pour assumer leurs tâches dans divers corps, notamment l’armée nationale, mais aussi les forces de sécurité intérieure, les douanes et les services pénitentiaires. Pas moins de 123 millions de dinars (MD) sont déjà affectés et nombreux sont les chantiers qui ont d’ores et déjà démarré.
Présidant début juillet dernier la cérémonie de fin d’année, pour la sortie des promotions et la remise des prix aux lauréats, le ministre de la Défense nationale, Abdelkrim Zbidi, a révélé les détails de ce projet d’ensemble ambitieux, qui vient à point nommé. Mais aussi visité les nouveaux chantiers lancés et posé en présence notamment de l’ambassadeur d’Allemagne à Tunis, Andreas Reinicke, la première pierre du nouveau centre universitaire, bénéficiant d’un don du gouvernement allemand d’un montant de 35 MD.
Voyage au cœur de l’Académie militaire
Nouvelles menaces hybrides dans un contexte géopolitique spécifique, en pleine transition démocratique: l’armée tunisienne, auréolée, fait sa mutation. Au quotidien, l’opérationnel est accaparant. Entre sécurisation des frontières et des bâtiments officiels et points névralgiques, lutte contre le terrorisme, mais aussi la migration clandestine et la contrebande, appui logistique et sécuritaire du processus électoral, comme des examens nationaux: l’engagement des forces armées est sans relâche, sans faille. La guerre asymétrique menée contre les terroristes change la donne. Il aura fallu s’y adapter.
Le stratégique est également essentiel, qu’il s’agisse de redéploiements, d’acquisition de nouveaux équipements et de planification à moyen terme...
Premier problème à résoudre, comme observé au sein des armées dans les pays en transition, le renforcement de l’encadrement des troupes. Avec la complexité des menaces hybrides et leur ampleur et la juridiction des actions, les petites formations, même de taille réduite, doivent être commandées par des officiers. Comment les recruter soigneusement et les former solidement pour en faire de vrais combattants? C’est la mission essentielle de l’Académie militaire. Fondée par Bourguiba, il y a maintenant plus de 52 ans, en décembre 1966, et installée dans l’ancien camp militaire français Servière, à Fondouk Jedid (27 km de Tunis), non loin de Grombalia, c’est une institution clé de formation dans des filières de première importance: les sciences militaires, l’ingénierie, les sciences juridiques et économiques et de gestion et autres. Ses diplômes font partie de ceux de l’ensemble des autres filières et disciplines de l’enseignement supérieur, mais constituent en matière de sécurité-défense un label d’excellence.
Toute la question est de savoir comment sortir de ce moule des combattants de haut niveau. Les jeunes Tunisiens - le système éducatif n’y aidant pas - n’étaient pas préparés jusqu’à une date récente à être militarisés. Une tournée d’information effectuée cette année, pour la première fois, par des officiers de l’Académie dans des lycées de tous les gouvernorats était très utile. Le débat engagé avec les jeunes et les éclaircissements fournis ont surtout permis de comprendre les attentes.
Pourquoi choisir l’Académie?
Une bourse mensuelle de 100DT durant les trois premières années, puis 200 D à partir de la quatrième année, la gratuité de l’hébergement, de la restauration, de la tenue et du transport, et la garantie de l’emploi sont déjà attractives. Surtout face à l’aggravation du chômage, plus particulièrement celui des jeunes diplômés du supérieur. Mais qu’adviendrait-il, si le chômage se résorbait et que le marché de l’emploi offrait des perspectives plus alléchantes? Comment alors répondre aux impératifs du recrutement au sein des forces armées et la formation des futurs officiers ? N’oublions pas qu’aujourd’hui, tous les officiers supérieurs et généraux, y compris les trois généraux chefs d’état-major de l’armée (terre, air, mer), ainsi que l’inspecteur général des forces armées (IGFA) et le directeur général de l’Agence nationale de renseignement, de sécurité et de défense, sont tous issus de l’Académie. Tout élève officier doit potentiellement aspirer à accéder à leurs grades et commandements. C’est cette perspective, nourrie de patriotisme et auréolée du prestige de cette institution et de la qualité de son enseignement, qui constitue la motivation essentielle des nouvelles recrues. La sélection sur concours national, puis une série de tests, sont alors essentielles.
D’où l’importance stratégique d’opérer une transformation profonde de l’Académie. Les chefs d’état-major et leurs collaborateurs y ont longtemps réfléchi. La vision du ministre de la Défense nationale, Abdelkrim Zbidi, sera déterminante pour décider de la configuration nouvelle. Son expérience universitaire en tant qu’enseignant (physiologie), doyen de la faculté de médecine de Sousse, recteur de l’université de Sousse, puis secrétaire d’État à la Recherche scientifique et à la Technologie, conjuguée à sa fonction de ministre de la Défense nationale (27 janvier 2011-13 mars 2013), puis depuis le 12 septembre 2017, lui a été très utile dans cette transformation. Une précieuse capitalisation d’une double expertise.
L’Académie militaire franchit ainsi une nouvelle étape, à la mesure des impératifs sécurité-défense qui s’imposent aujourd’hui à la Tunisie et façonneront en grande partie son intégrité territoriale et sa sécurité.
Lire aussi:
Aux origines de l’Académie militaire: le camp Servière