Férid Ben Brahim - 2020 : l’année de tous les dangers
« Il n’est pas nécessaire à un prince de posséder toutes les vertus mais il est impératif qu’il paraisse les avoir. »
Nicolas Machiavel, le Prince Chapitre XIII
Au sortir d’une année 2019 qui aura connu le décès d’une figure tutélaire de la Tunisie et un gouvernement qui aura eu l’assiduité de bien prendre les décisions les plus léthargiques de ces dernières années dans le domaine économique, n’ayant pas osé les nécessaires réformes de rupture ; le pays sort exsangue financièrement et encore plus moralement.
Un nouveau gouvernement est dans les chaudrons. Qu’elles que soient les épices qui serviront à mitonner cette structure, pour le bien du pays nous lui souhaitons bonne route et bonne chance. La Tunisie est arrivée aux limites de ce qu’elle peut supporter.
En Libye, les bruits de guerre se font de plus en plus entendre. Aux bottes ottomanes les brodequins égyptiens font écho. Nous sommes aux portes d’un conflit qui, s’il se déclenche, sera l'un des plus meurtriers dans le monde arabe. Tous les ingrédients, politiques, sociaux, ethniques, sont là pour rendre la situation insoluble et l’impact sur notre économie désastreux.
Au Moyen-Orient, le conflit américain fait écho aux provocations de ses ennemis. La conséquence en est la hausse du prix du baril de pétrole et la prime de risque qui s’élargit sur toute la zone « Middle East North Africa », la Tunisie en paiera malheureusement le prix fort.
A l’intérieur du pays les contraintes qui vont peser sur le nouveau gouvernement sont oppressantes: l’Etat Tunisien doit rembourser l’équivalent en devises de 6,6 milliards de dinars, le déficit budgétaire réel pour 2019 est de l’ordre de 5%, le déficit de la balance commerciale devrait frôler les 20 milliards de dinars et la croissance du PIB 2019 en volume se stabilisera à 1,1%. L’inflation se stabilise à un niveau élevé avec une hausse des prix des produits alimentaires, celle que perçoit en premier le citoyen, de plus de 13% sur un an. Tout ceci se présente dans un environnement social où la pauvreté explose avec une disparité choquante (10% des enfants des régions défavorisées sont en malnutrition- MICS Tunisie 2018).
Nous n’avons pas d’autres choix que de sortir par le haut avec quelques principes de base:
• redonner confiance en l’Etat Tunisien qui en retour devra être plus et mieux au service des citoyens,
• rétablir le sentiment d’égalité des chances entre les régions par des décisions rapides, visibles et concrètes,
• dégager les ressources nécessaires pour que l’investissement productif se fasse sentir et que les chantiers et autres investissements de l’Etat soient visiblement menés et terminés,
• prendre des mesures fiscales et sociales temporaires pour que l’investissement privé redémarre en 2020 et 2021,
• se financer sur les marchés extérieurs auprès de sources bilatérales (Chine ?) pour un montant suffisamment élevé pour faire la jonction avec les besoins 2020-2024.
8 janvier 2020
Férid Ben Brahim