La loi d’exemption du service militaire des ultra-orthodoxes divise les israéliens mais sauve le gouvernement Netanyahou
Mohamed Larbi Bouguerra - Alors que lundi 10 mai 2024, quatre soldats israéliens ont été tués par la résistance palestinienne, que quatre autres ont été grièvement blessés – dont un officier- et un dernier soldat légèrement blessé, le gouvernement Netanyahou a fait voter dans la nuit de mardi l’exemption du service militaire des étudiants des écoles religieuses (yeshiva)**. Soixante-trois députés ont voté pour et 57 contre, dont le ministre de la Défense Yoav Gallant, membre pourtant du Likoud. Du coup, les appels à son exclusion du gouvernement et des députés du parti se multiplient en direction de Netanyahou. (The New York Times, 10 juin 2024).
Les partis ultra-orthodoxes des ministres suprémacistes et racistes qui habitent dans une colonie illégale, Ben-Gvir, le kahaniste, et son acolyte Smotrich – qui affirme que le peuple palestinien est un mythe- ont voté en faveur de cette loi.
Portant, le procureur général de l’Etat, Gali Baharav-Miara avait affirmé que le projet de loi n’était pas adapté à la réalité actuelle et ne tenait pas compte des besoins de Tsahal.
Après le scrutin, le chef de l’opposition et ancien Premier Ministre Yair Lapid, a qualifié ce vote de «l’un des pires moments de honte jamais vécus par la Knesset israélienne», affirmant qu'«au milieu d’une nouvelle journée de combats acharnés dans la bande de Gaza, le gouvernement naufragé a adopté une loi d’évasion et de refus. Tout est politique. Zéro valeur», a déclaré Lapid. (Haaretz, 10 juin 2024).
L’ex-chef des armées, Benny Gantz, de son côté, a quitté le cabinet de guerre en reprochant à Netanyahou d’être l’otage de ses alliés d’extrême droite suprémacistes juifs.
Le vote de cette loi permet à Netanyahou de sauver son gouvernement et sa majorité extrémiste et d’éviter ainsi de rendre compte à la justice des accusations de corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires distinctes qui pèsent sur lui. Mais sa coalition ne tient qu’avec l’accord des suprémacistes religieux fascistes.
Les racines du mal
La question de l’exemption du service militaire trouve son origine en 1948, lorsque les dirigeants laïques comme Ben Gourion ont promis une autonomie et des privilèges à la minorité ultra-orthodoxe en échange de son soutien à la création d'un État largement laïc. En plus d'être exemptés de l'appel sous les drapeaux, les Haredim sont autorisés à gérer leur propre système éducatif. A l’époque, ils étaient relativement peu nombreux, leurs privilèges importaient moins aux yeux des Israéliens. Aujourd'hui, avec la guerre de Gaza et ses 298 tués parmi les forces d’occupation, les Israéliens sont révulsés par les cadeaux faits aux haredim qui sont plus d'un million, soit environ 13 % de la population, alors qu'ils n'étaient que 40 000, soit 5 %, en 1948. Ils représenteront environ 16 % de la population à l’horizon 2030. L’exemption des hommes en noir est dure à avaler pour les Israéliens ! Israël est une société fracturée et la religion divise de plus en plus.
Rappelons que les yeshivas ne dispensent qu’un enseignement religieux d’étude de la Torah grassement subventionné par l’Etat. Point de sciences ni de langues étrangères ou d’informatique. A leur sortie de la yeshiva, ces hommes vivent du travail des femmes.
La religion est partout en Israël : mariage, divorce, enterrement, conversion…tout est entre les mains des rabbins y compris des téléphones cacher qui ne donnent accès qu’à des sites autorisés par l’homme de religion. Peu de gens savent que dans tous les établissements militaires israéliens : casernes, écoles, centres d’entraînement…, la nourriture est cacher et quiconque y amène des aliments non cacher est sanctionné.
Mohamed Larbi Bouguerra
** Saluons la mémoire des quatre Palestiniens tués lundi 10 mai dans leur véhicule dans le village de Kafr Naama près de Ramallah par des agents infiltrés du Shin Bet. Un des martyrs, Mohamed Jabar, avait déjà été emprisonné vingt ans par Israël et deux autres étaient recherchés pour avoir mis le feu à une remorque dans un avant-poste illégal de la colonie de Sde Yair en Cisjordanie. 538 Palestiniens ont été tués depuis le 7 octobre par les forces de l’occupant sioniste.