News - 12.12.2025

Dar Ben Abbes: Une résidence d’artistes inspirante à Téboursouk

Dar Ben Abbes: Une résidence d’artistes inspirante à Téboursouk

Vous êtes artiste-peintre, sculpteur, écrivain ou compositeur de musique, originaire de Tunisie, de Belgique ou d’un pays méditerranéen et vous cherchez à passer un séjour créatif au cœur du Nord-Ouest tunisien ? Dar Ben Abbes, dans la médina de Téboursouk, vous accueillera pour une résidence artistique d’une semaine à un mois. Cette vieille maison familiale entièrement réhabilitée et rénovée est érigée en pont culturel entre la Tunisie et la Belgique par son propriétaire et mécène Mahmoud Ben Abbes. A la tête de la Fondation Ben-Abbes qu’il a créée en Belgique 2022, fondation d’utilité publique reconnue par arrêté royal, il œuvre à l’accomplissement d’un projet plein de promesses.  

Signe d’intérêt porté à Dar Ben Abbes, Son Altesse Royale la Princesse Léa de Belgique a fait spécialement le déplacement en Tunisie pour l’inaugurer le samedi 15 novembre 2025, créant un véritable évènement à Téboursouk. Mahmoud Ben Abbes voyait ce jour-là se réaliser un rêve d’enfant. C’est dans cette maison où il est né, à la fin des années 1950, dans une famille nombreuse de douze frères et sœurs issus de trois mariages de son père. Il aimait jouer dans le quartier, fréquenter le kouttab, puis l’école et la maison du peuple, apprendre la clarinette et le théâtre, avant de se «rebeller», comme il le dit. Il ira au lycée agricole de Thibar, fondé par les Pères blancs, puis se résoudra à aller poursuivre ses études en Belgique qu’il réussira d’abord, puis sa carrière professionnelle dans la gestion et l’expertise comptable.

Mahmoud Ben Abbes conseillera de nombreuses entreprises belges à se délocaliser en Tunisie. Pour répondre à leurs besoins en logistique et transport, il créera une compagnie spécialisée, la Comatral, qui atteindra en rythme de croisière plus de 150 camions en rotation par semaine dans les deux sens. Plus tard, il se lancera dans le fret aérien, avec un leader mondial. En reconnaissance de ses efforts pour la promotion des échanges économiques, il sera nommé conseiller du commerce extérieur. Puis, par décision du Roi, il sera promu conseiller en diplomatie économique. Une belle consécration.

Sans cesse, il cherchera à établir un nouveau pont entre son pays natal et celui d’adoption, se sentant redevable de leur rendre un peu de ce qu’ils lui ont donné.

Lorsque Mahmoud Ben Abbes a été prévenu que la maison familiale se dégradait et menaçait de tomber en ruine, il s’empressa de racheter les parts de ses frères et sœurs pour entreprendre sa réhabilitation et sa sauvegarde. Au début, il n’avait pas d’idée précise quant à son usage, sauf celle de la dédier d’une manière ou d’une autre à la promotion de la culture et des arts entre les deux pays. Tout en engageant les études nécessaires, puis les travaux, il a pensé qu’il serait utile de créer une fondation en vue de «tisser un fil vivant entre deux pays aux cultures riches et complémentaires».  Avec des amis belges et tunisiens, diplomates, financiers et juristes, la fondation prendra forme et le projet Téboursouk commencera à voir le jour. «La fondation comptera parmi ses membres des personnalités tunisiennes et belges de haut rang dont Maître Charlotte Piers, M. Patrick De Beyter, M. Jean-Luc Calant et également Maître Wajdi Khalifa», nous dit-il.

Du fond de la mémoire

Le lancement officiel de la fondation sera célébré le 7 octobre 2022 lors d’une soirée à la Galerie des glaces au Palais d’Egmont, siège du ministère belge des Affaires étrangères. Des personnalités de premier plan étaient présentes, notamment Didier Reynders, ancien vice-Premier ministre et alors commissaire européen à la Justice, ainsi que de grands amis de la Tunisie, autour de l’ambassadeur Nabil Ammar. Des projets se mettaient en place : participation à des actions éducatives en Tunisie, journées d’immersion culturelle pour le corps diplomatique dans les trésors du patrimoine du Nord-Ouest, rencontres et autres. Dar Ben Abbes se pare de son magnifique aménagement et de sa superbe décoration pour s’apprêter à recevoir au cours du premier trimestre 2026 ses premiers résidents.«J’ai puisé au fond de mes souvenirs d’enfant les représentations de la maison familiale comme elle était inscrite dans ma mémoire», nous dit Mahmoud Ben Abbes. «Une image sans doute plus délicieuse, mais comme je voulais qu’elle le soit aujourd’hui.» Sur une superficie de 250 m2 de bâti, en deux étages, cette demeure se veut accueillante et inspirante. Téboursouk, à près de 100 km de Tunis, est érigée au pied d’une colline élevée de 400 m. De la terrasse, on admire les oliveraies de la vallée de l’oued Khalled et l’étendue des champs. Dougga n’est qu’à 6 km. Classée par l’Unesco sur la liste du patrimoine mondial, c’est «la petite ville romaine la mieux conservée de l’Afrique du Nord.»

Inspirer, promouvoir le Nord-Ouest

«Les heureux résidents de Dar Abbes pourront y trouver toute la sérénité et la quiétude pour s’adonner à leurs arts, souligne Mahmoud Ben Abbes. Ils pourront également effectuer des randonnées dans les environs pour aller à Dougga, ou pousser plus loin leurs visites dans le Nord-Ouest. Une manière de s’imprégner de la région et en rendre compte dans leurs créations.»«Notre souhait, poursuit-il, est que chaque résidence artistique se termine par une exposition pour les artistes-peintres et sculpteurs, une séance de lecture pour les écrivains et poètes, ou un concert pour les compositeurs de musique. Ce sera-là de bonnes occasions d’interaction avec les habitants de la ville.»

Féru d’art et de culture, Mahmoud Ben Abbes est nostalgique de ses activités de prime jeunesse à Téboursouk. Il entend contribuer à travers la fondation à la relance de ces activités pour offrir aux jeunes des lieux d’épanouissement, et aider à la restauration de certains vieux édifices en délabrement. C’est ainsi qu’il pense particulièrement à la mosquée Sidi Ben Ahmed, dont il avait fréquenté le kouttab, et à l’église, transformée en maison du peuple, grouillant alors d’activités et se trouvant aujourd’hui à l’abandon. Mais, avec ses coéquipiers membres de la fondation, où tout se décide dans la collégialité, d’autres projets sont en cours d’élaboration.

De Tanit à Isis

L’inauguration de Dar Ben Abbes par Son Altesse Royale la Princesse Léa de Belgique a suscité l’enthousiasme de tous. Elle avait également marqué par sa présence, la veille d’une soirée à l’occasion de la Fête de Sa Majesté le Roi, à la Résidence de Belgique. Au programme, un concert de musique traditionnelle tunisienne interprétée par Moufadhel Adhoum au luth, Aïda Niati au chant et à l’harmonium et Mohammad Ibn Haj Kacem à la percussion, en symbiose tuniso-belge. Toujours sur la même lancée, et en présence de Son Altesse Royale la Princesse Léa de Belgique, la fondation a organisé, le jeudi 13 novembre 2025, un colloque international intitulé «De Tanit à Isis: figures féminines et héritages contemporains», au Palais Ennejma Ezzahra à Sidi Bou Saïd. Trois historiens de renom sont intervenus à cette occasion : les professeurs Christian Cannuyer, Mohamed Hassine Fanter et Zakia Loum (Université de Bordeaux III).«La fondation a la chance de compter sur l’appui d’illustres personnalités tunisiennes, belges, et d’autres pays, et de bénéficier du soutien des ambassadeurs dans les deux pays, Sahbi Khalfallah à Bruxelles et François Dumont à Tunis», tient à souligner Mahmoud Ben Abbes. Il associe à cet hommage les membres de la fondation ainsi que la ville de Téboursouk. «Nous pouvons faire encore plus, et beaucoup mieux, mais nous y allons concrètement et en toute modestie», conclut-il.