News - 10.01.2015

Mohamed Ennaceur: Ma double ambition pour Le Bardo

Quand il était monté le 4 décembre dernier au perchoir de la nouvelle Assemblée des représentants du peuple, porté par une majorité consensuelle, Mohamed Ennaceur était partagé entre l’émotion et la détermination. L’émotion de devenir le premier président de l’Assemblée issue de la Constitution de la deuxième République et la détermination d’y laisser son empreinte. Comme il l’avait toujours fait durant sa longue carrière au service de l’Etat, il n’était jamais parti sans avoir réalisé de grands projets, réussi d’âpres négociations, scellé des accords solides, créé de la valeur politique, économique et sociale.

Quitte à démissionner quand ses convictions le lui commandent, comme il avait osé le faire sous Bourguiba, en décembre 1977, à la veille de la sanglante confrontation du gouvernement Nouira avec l’Ugtt, alors dirigée par Habib Achour, en ce fameux 26 janvier 1978.

Aujourd’hui, le contexte est historique, les enjeux sont cruciaux et les défis multiples. Que pourra-t-il faire pour que l’Assemblée joue pleinement son rôle d’institution centrale du nouveau système politique dans le nouveau régime parlementaire ? Et que devra-t-il faire pour que l’institution gagne dans son fonctionnement au quotidien en efficience et se modernise ? Dans ce magnifique palais du Bardo, l’un des rares monuments au monde où l’Etat est présent sans discontinuité depuis plus de 8 siècles, et où il avait personnellement siégé par deux fois en 1974, puis en 1981, il a rapidement retrouvé ses repères. Son programme est déjà prêt.

S’il faut lui donner un surnom, il ne peut être que Monsieur Dialogue. S’il poursuit un objectif, il a toujours été pour lui le consensus. Deux valeurs que Mohamed Ennaceur met sans cesse à l’œuvre depuis son accession aux charges publiques, au service de la Tunisie. Jeune administrateur du gouvernement, au lendemain de l’Indépendance et chargé de mission auprès du ministre Me Mondher Ben Ammar (Santé et Affaires sociales), il en a appris les vertus.

Pour ce diplômé de l’Institut des hautes études de Tunis et docteur en droit social de l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, ce sera son credo. Tant pour gérer les relations professionnelles, diriger le gouvernorat de Sousse qui englobait alors Monastir et Mahdia, créer l’Office de l’emploi, de l’émigration et de la formation professionnelle, diriger par trois fois le ministère des Affaires sociales, représenter la Tunisie en ambassadeur-représentant permanent auprès de l’ONU à Genève ou présider le Conseil économique et social. Ecoute, dialogue, concertation, négociation et consensus seront ses outils permanents.

Son premier discours de président de l’Assemblée des représentants du peuple y fera référence en positionnant l’ARP au cœur de cette large concertation et de cet esprit de consensus. «Pour relever les immenses défis qui nous attendent, dira-t-il, nous devons faire preuve de patience et de persévérance, faire prévaloir la culture du consensus et l’esprit de solidarité et rendre aisée la coordination interinstitutionnelle. Je serai mû par la volonté de faire de cette institution, dont la mission fondamentale revêt certes un caractère législatif, un forum pour l’échange des idées et des opinions relatives aux dossiers nationaux et internationaux».

Baliser la piste d’envol de la nouvelle Tunisie et la sécuriser

Dans son esprit, Mohamed Ennaceur estime que l’ARP doit constituer une force certes législative et de contrôle de l’exécutif, mais aussi et surtout de mobilisation pour l’accomplissement des attentes des Tunisiens et de stabilisation générale du système politique dans son ensemble. Il appartient en effet aux élus de la Nation de lui apporter la consolidation nécessaire. Les années à venir ne seront pas de tout repos et la conjoncture s’annonce difficile. Des arbitrages seront nécessaires, des réformes douloureuses à amorcer avec courage et une grande vigilance à observer pour garantir le respect des libertés et la progression démocratique. Les accords indispensables sur les questions clés – et elles ne manquent pas – ne seront pas faciles à sceller : la fiscalité, la santé, la compensation et autres sont en tête de liste d’une série d’urgences.

La discussion des différentes options possibles peut englober l’ensemble des acteurs concernés. Rien n’empêche alors de bénéficier de l’apport du Dialogue national dans une nouvelle formule plus riche, plus large et plus structurée, en y intégrant notamment les présidents des groupes parlementaires, la société civile, des compétences de l’administration, de l’université et du secteur privé (voir encadré). L’essentiel pour lui est de fédérer tous les acteurs afin de baliser la piste d’envol de la Tunisie durant les toutes prochaines années et de la sécuriser pour que le gouvernement puisse s’atteler convenablement à sa mission selon le contrat-programme qui sera adopté de manière consensuelle.

Une administration parlementaire performante

Ce rôle central de l’ARP et cette mission de soutien effectif à la relance générale ne peuvent s’accomplir, pour Mohamed Ennaceur, sans que l’Assemblée puisse reposer sur une administration renforcée, efficiente et modernisée. Avec ses maigres ressources actuelles, un budget de 21.714 MD consacré essentiellement aux rémunérations, et des effectifs de 383 salariés, il est évident qu’elle ne saurait apporter tout l’appui nécessaire au nouveau rôle qui lui est assigné.

Motivation du personnel et renforcement des effectifs, refonte du système d’information en introduisant les nouvelles technologies de communication tant pour les élus que pour le personnel et modernisation des équipements de gestion ainsi que des autres outils de travail, ne sauraient souffrir le moindre retard.Tout d’ailleurs comme l’amélioration des conditions de travail des députés, à l’instar de leurs pairs dans les démocraties. Mohamed Ennaceur est en effet convaincu que la qualité du travail parlementaire en dépend largement et affirme qu’il s’y emploiera. Un autre aspect, et non des moindres, n’échappe pas à son attention : plus que la préservation du Palais du Bardo, lui donner de nouvelles vocations patrimoniales.

Tags : mohamed-ennaceur  
Vous aimez cet article ? partagez-le avec vos amis ! Abonnez-vous
commenter cet article
0 Commentaires
X

Fly-out sidebar

This is an optional, fully widgetized sidebar. Show your latest posts, comments, etc. As is the rest of the menu, the sidebar too is fully color customizable.