News - 26.06.2019
Qui sera le nouveau bâtonnier des avocats de Tunisie
Les 8000 avocats de Tunisie auront à élire samedi 6 juillet, leur nouveau bâtonnier, devant succéder à Me Ameur Mehrezi. Elu il y a trois ans, le 11 juillet 2016, le bâtonnier sortant ne peut, conformément aux dispositions du Décret-loi n° 2011-79 du 20 août 2011 portant organisation de la profession, cumuler successivement deux mandats de suite. La voie est ainsi ouverte aux successeurs, pour le choix du 21ème bâtonnier depuis l’indépendance, le premier étant Me Chadly Khalladi (1958 -1961). La liste des candidats au conseil national de l’Ordre des avocats de Tunisie (CNOAT), postulant pour les 14 sièges à pourvoir et devant faire émerger le bâtonnier, est longue. L’enjeu essentiel est la politisation ou non de cette instance.
Récupération ou indépendance
Entre tentatives de mise sur orbite en galaxie de certains partis, notamment Ennahdha, et indépendance totale pour se concentrer exclusivement sur la défense de la profession et sa promotion, le choix est crucial. Les luttes partisanes laissent planer leur ombre, clivant les rangs et suscitant tensions. Le rôle du bâtonnier est essentiel pour préserver l’Ordre de ces tiraillements et s’attaquer aux vrais problèmes qui, d’ailleurs ne manquent pas. Avec l’affluence massive de jeunes avocats, (aboutissant à la multiplication par deux des inscrits au tableau de l’Ordre, rien qu’entre 2006 et 2010), sans trouver suffisamment de cabinets pour les accueillir en stagiaires, ni d’affaires à défendre, la limitation du champ d’exercice de la profession et, au même moment, l’autorisation d’autres professions à fournir le conseil juridique et fiscal, les entraves sont de taille. La non-désignation d’office d’un avocat dans toutes les affaires au titre de l’assistance judiciaire prise en charge par l’Etat, le régime fiscal imposé aux avocats (soustraction en tant que frais professionnels uniquement de 20% au lieu de 30% de leur assiette imposable, TVA majorée à 13% au lieu de 6% pour les médecins), et les changements profonds qu’introduira l’ALECA (Union européenne) constituent de véritables préoccupations.
Précarité
Réunis en assemblée générale ordinaire dès le vendredi 5 juillet au Palais de la Foire de la Charguia, les avocats auront à en débattre en profondeur. Plus particulièrement la situation très précaire d’un grand nombre de jeunes avocats et même de moins jeunes, sera sans doute de nouveau à l’ordre du jour. L’aboutissement de ces délibérations aura lieu le lendemain, après adoption des rapports moral et financier, à la faveur de l’élection tant attendue et sans doute fort animée, comme de tradition.
Mes Boubaker Ben Thabet et Brahim Bouderbala
La course s’annonce en effet serrée. Parmi les candidats en lice qui affichent le plus de chance pour le bâtonnat, chacun conduisant sa propre liste, se distinguent deux grandes figures du barreau, très impliqués de longue date dans les activités de l’Ordre. Il s’agit de Me Boubaker Ben Thabet, ancien secrétaire général du conseil national, notamment du temps du bâtonnier Abderrazak Kilani (2010 - 2012), puis du bâtonnier Mohamed Fadhel Mahfoudh ( 2013 - 2016) et de Me Brahim Bouderbala qui avait fait montre d’intense implication en tant que membre du conseil, notamment lors du mandat du bâtonnier Abdelwaheb Béhi (1992 -1998). Me Ben Thabet avait été par ailleurs, lors des élections de l’Assemblée nationale constituante en 2011, secrétaire général de l’ISIE présidée alors par Kamel Jendoubi. Quant à Me Bouderbala, qui s’est toujours tenu à l’écart de tout engagement politique et partisan, ni avant 2011, ni depuis, il s’est consacré uniquement, depuis son adhésion à l’association des Jeunes avocats, puis son accession au CNOAT, à l’action professionnelle au sein de l’Ordre.
Il faudrait revenir à la dernière assemblée générale ordinaire de juillet 2016 et de sa séquence électorale pour trouver des indices intéressants. Parmi les cinq candidats en lice, figuraient alors : Mes Ameur Mehrezi, Boubaker Ben Thabet, Brahim Bourderbala, Imed Ben Cheikh Larbi et Hanifi Fridhi. Au total, les 3197 avocats ont pris part au vote ont élu, dès le premier tour, Me Mehrezi, avec 1595 voix devançant de plus de 500 voix Me Ben Thabet qui n’a recueilli que 977 suffrages.
Trois ans après, Me Boubaker Ben Thabet a attendu ce nouveau rendez-vous avec les urnes pour solliciter le soutien effectif de ses confrères qui partagent avec lui les mêmes orientations politiques et pour la gestion du CNOAT. De son côté, Me Brahim Bouderbala s’accroche à la ligne corporatiste dont il avait preuve, depuis sa première élection en 1987, pour un mandat de deux ans, et un deuxième successivement, de trois ans, en 1989. En 1992, il sera élu président de la section de Tunis du CNOAT et y sera reconduit jusqu’en 1998. Cet ancien président de l’Association des Jeunes Avocats (1983 -1984), après en avoir assumé le secrétariat général (1981 -1983), croit lui aussi en toutes ses chances.
Verdict des urnes dans quelques jours, le 6 juillet 2019.
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