News - 26.04.2025

Foued Mebazaa: l’intérim peu facile à assurer

Foued Mebazaa: l’intérim peu facile à assurer

Par Mohamed Kilani - Le 15 janvier 2011, Foued Mebazaa n’a été amené à assumer la charge de président de la République par intérim que par un accident de l’histoire. L’immolation de Bouazizi, le départ précipité de Ben Ali à Djeddah la veille, le jour de la grande mobilisation à Tunis, et le mécanisme constitutionnel l’ont propulsé à la magistrature suprême, en tant que président de la Chambre des députés, à son insu et en dépit de sa résistance. Le contexte ne favorisait point la deuxième variante, Abdallah Kallel, le président de la Chambre des Conseillers étant un homme tellement vilipendé qu’on a probablement fait l’économie d’un second soulèvement populaire. Au moins Mebazaa se réclamait davantage de Bourguiba, son mentor, que de Ben Ali, et ne traînait pas de casseroles éliminatoires.

Foued Mebazaa ne se sentait pas prêt pour cette mission aux contraintes insurmontables dans un environnement chargé de périls et d’incertitudes. Et puis l’homme a toujours été un haut commis de l’Etat à la discipline avérée ce qui explique une longévité politique ininterrompue d’un demi-siècle. Avec Ben Ali, il avait en commun cette implication dans l’activité professionnelle ou politique depuis 1957. Mais comme attendu, il ne pouvait que subir les pressions de toutes parts d’autant que son Premier ministre Mohamed Ghannouchi se trouvait embarrassé par son appartenance au régime déchu. Cette ambivalence mettait donc ce président providentiel dans un inconfort total au point de procéder à l’insu de son plein gré à l’amnistie générale, à la dissolution du RCD et de la Chambre des députés qu’il présidait, ce qui n’était pas peu. En plus de l’autorisation de partis que la loi interdisait en raison de leur référence idéologique ou religieuse.

La nomination, le 28 février 2011, de Béji Caïd Essebsi, son ancien ministre à l’Intérieur, est venue le soulager des fardeaux quotidiens lui permettant de se décharger sur lui de tous les dossiers brûlants ou embarrassants. Et c’est pratiquement BCE qui, contre l’avis de ses amis chevronnés en politique, laissa la Haute Instance présidée par Yadh Ben Achour imprégner le processus démocratique. Ce trio a immanquablement le pays sur la voie de l’inconnu, de l’instabilité et de l’incertitude. Dix ans après, la Tunisie endure les effets ravageurs d’un processus visant la démocratie mais secrétant l’anarchie, le banditisme et l’appauvrissement. Il est confortable de prétendre, quelques années après le 14-Janvier qu’on aurait dû procéder autrement.

Mais Foued Mebazaa peut se flatter d’avoir laissé la volonté générale imprégner l’action politique sans chercher à lui faire obstruction, sans s’apercevoir toutefois que le pays était privé de garde-fous en raison d’un déficit citoyen criard. Etant un homme de système, il n’était pas capable dans sa culture profonde de bousculer l’ordre établi. Parmi ses performances un exploit sportif avec une qualification en Coupe du monde, au demeurant très remarquable. C’est lui, en tant que ministre des Sports, qui a eu l’idée audacieuse de faire appel à un entraîneur âgé de 35 ans, Abdelmagid Chétali. Après l’Argentine, la presse internationale n’a pas tari d’éloges à l’endroit de ce technicien doué. Une épopée qui peut ainsi effacer le souvenir des émeutes populaires survenues à Tunis après la Guerre des six jours, quand Mebazaa était directeur général de la Sûreté nationale. C’est lui-même qui proposa à Bourguiba de le décharger, une confidence demeurée secrète.

Le mandat de Foued Mebazaa, en 2011, c’est aussi celui des décrets lois qui ont permis la continuité de l’Etat et l’organisation de la vie politique dans une phase transitoire pleine de secousses, d’égoïsmes et d’antagonismes idéologiques ou politiques. A l’évidence, seul l’intérêt du pays semblait le motiver, mais la suite allait le démentir. Et le pays de subir des décisions aux conséquences désastreuses prises dans la foulée du 14-Janvier. La plus néfaste étant l’adoption d’une loi d’amnistie générale ayant facilité le retour en grande pompe de Rached Ghannouchi sans comparaître devant la Justice, et favorisé la prise du pouvoir en Tunisie par l’islam politique. Une page peu glorieuse s’ouvrait ainsi dans l’histoire de la Tunisie sur fond de transition démocratique devenue un alibi pour tous les égarements. Foued Mebazaa, à l’instar de nombre de candides, n’a rien vu venir. Lui accorder le bénéfice de la bonne foi ? Sans aucun doute.

Mohamed Kilani

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