Boubaker ben kraiem: Pour perpétuer la mémoire nationale !!
Il est curieux et étonnant qu’une partie de l’élite intellectuelle et essentiellement les historiens et chercheurs dans ce domaine ainsi que les professionnels des médias oublient vite ou ne retiennent pas les déclarations de certains Chefs d’Etat quand il s’agit, surtout, de faits ou d’évènements relatifs à notre pays. J’ai été, le 30 novembre 2017 au soir, l’un des téléspectateurs, ayant assisté, avec beaucoup d’attention et d’intérêt, au dossier présenté par une TV tunisienne et relatif à l’assassinat du Grandissime Leader National et Syndical Farhat Hached. Ce programme, vu son importance, a certainement, été suivi par des centaines de milliers si ce n’est quelques millions de nos concitoyens. La question principale posée par le présentateur était fort simple *Qui a donc assassiné le Leader FarhatHached ?*Et ce furent, entre autres intervenants, de nombreuses personnalités (des historiens, des politiciens, d’anciens responsables, en plus du fils du Leader, si Noureddine Hached). Chacune des personnalités interrogées, à ce propos, allait de sa propre réponse et explication : main rouge, colons, extrémistes, etc….
Mon frère ainé et en même temps mon tuteur, ayant été orphelin dès l’âge de six ans, feu si Abdelaziz Mestouri, grand militant, fondateur et président de la Ligue Tunisienne des Anciens Combattants Tunisiens, étant très proche du grand Leader Hached, je m’intéressais, malgré mon jeune âge, à cette exceptionnelle figure de la vie syndicale et politique de notre pays. J’ai été, comme tout le peuple tunisien, sonné, très affecté et énormément touché d’apprendre en ce vendredi 5 décembre 1952, la triste nouvelle annoncée par *Radio Londres* en langue arabe.
Ce qui m’a surtout étonné, surtout de la part des médias, est le fait qu’ils ont vite oublié que l’ancien président français, monsieur François Hollande, lors d’une de ses visites en Tunisie, il n’y a pas si longtemps, a demandé à rendre visite à la veuve du grand Leader Farhat Hached. Et lorsqu’il l’a rencontrée, il lui a remis le dossier relatif à l’assassinat du Leader Hached et cette visite a été largement relayée par les médias. En fait, il s’agissait d’un crime d’Etat, les Services de Renseignements français, venus de Paris, ont effectivement préparé, organisé et exécuté cet affreux assassinat. D’ailleurs, la minutie de la préparation de cet acte odieux (la répartition destâches entre les deux équipes motorisées désignées pour accomplir cette mission et dont la deuxième devait terminer le travail de la première si celle-ci n’y arriverait pas) ne peut être effectuée que par des services, hautement, spécialisés et expérimentés.
Aussi, n’est-il pas surprenant de se rendre compte qu’une information de cette importance et de cette valeur, confirmée par le président de la république d’une grande puissance ne soit pas retenue par une partie de l’élite et des médias qui devraient être, normalement, les premiers intéressés par une telle affaire qui intriguait tous les tunisiens depuis plus de soixante ans ?
D’autre part, ce n’est pas la première fois que le problème de l’assassinat du grand Hachedsoit posé : plusieurs stations radios et chaines de télévision en ont discuté par le passé récent et souvent l’organisation de*la Main Rouge*, qui assassina aussi le leader HediChaker et les frères Haffouz, entre autres, comparable à l’OAS d’Algérie qui a assassiné de nombreux citoyens algériens suite au référendum du 5 juillet 1962, était souvent pointée du doigt. Espérons que les historiens et les médias tunisiens retiennent, enfin, ces données.
Que le Grandissime Hachedrepose en paix et que Dieu le Tout Puissant lui accorde Son Infinie Miséricorde et l’accueille dans Son Eternel Paradis.
Cet oubli m’amène à penser que l’on ne devrait pas s’étonner de constater que les jeunes de cette génération ignorent une bonne partie de l’histoire contemporaine de notre pays. D’ailleurs combien de Tunisiens, jeunes ou moins jeunes, connaissent l’importance de la participation de l’Armée Nationale dans l’œuvre de développement du pays ? Seule la création de l’oasis de RjimMaatoug qui est souvent citée pour de multiples raisons est connue. Qu’en est-il de l’œuvre du siècle, la réalisation de la route traversant le Chott el jerid, longue de plus de cent kilomètres et qui a été la cause de la mort accidentelle, lors du chantier, de quelques soldats, et la blessure d’une bonne douzaine.L’exécution de cette œuvre se poursuivait hiver comme été, avec près de cinquante degrés de température. D’ailleurs, le dossier du projet, préparé depuis des décennies, n’a pas trouvé, à l’époque, preneur. Il a fallu, entre autres, et en vue d’éviter le phénomène de rejet, transporter des millions de mètres cubes de remblai de la Sebkha du Chott pour rehausser la route. Et nous avons demandé, depuis longtemps, depuis une dizaine d’années, aux Hautes Autorités, de faire ériger deux stèles, l’une du côté de Kebili et l’autre du côté de Tozeur en vue de marquer pour l’histoire cette œuvre grandiose, attendue depuis plus d’un siècle et qui a désenclavé la région du Jerid.Celles-ci, portant le titre de * Cette route est l’œuvre de l’Armée Nationale* comporteront des informations sur les personnels qui l’ont réalisée (effectifs, morts, blessés) et des données techniques s’y rapportant(délais, nombre de millions de mètres cubes de remblai utilisés, etc..).D’autres projets non moins importants l’ont été, aussi, par l’Armée et on peut citer, à titre d’exemple : la route Remada –Dhibat, la construction des villages de Bordj Bourguiba et de Bordj El khadhra, l’antenne de télévision dans la région de Tataouine et surtout l’adduction d’eau potable pour l’ile de Kerkennah. Ces projets et tant d’autres, non moins importants, méritent aussi, d’être marqués pour l’histoire et pourquoi pas ?
Par la même occasion, pourquoi nous n’essayons pas d’enrichir notre patrimoine historique en renforçant, pour consolider, àtravers les siècles, les relations des jeunesses tunisiennes et algériennes, toutes deux, responsables de l’avenir des relations fraternelles entre la Tunisie et l’Algérie, ces relations qui ont été relayées, à travers les âges et les périodes, par l’appartenance à la même région, à la même histoire et aux mêmes langue et culture, et qui ont subi le même colonialisme. Ces relations sont devenues indéfectibles, sûres et constantes, grâce à l’appui et à l’assistance illimités fournis aux moujahidines algériens par le gouvernement et le peuple tunisiens lors de la lutte de l’Algérie pour son indépendance. Mais combien de Tunisiens et d’Algériens sont au courant de ce qu’a fait la Tunisie pour l’Algérie lors de cette guerre anti-coloniale, entre 1956 et 1962 ? Aussi, et dans le but d’immortaliser cet appui, pourquoi ne pas matérialiser la présence de près de vingt mille combattants de l’ALN dans notre pays et cela en érigeant, dans les zones où ont été implantées les plus importantes bases des combattants de la liberté et à raison de trois dans chacun des gouvernorats de Jendouba, du Kef et de Kasserine, ces bases devenues historiques pour nos frères algériens comme pour nous, des stèles commémoratives de ces Hauts Lieux de la résistance ?Faut-il rappeler que deux anciens présidents de l’Algérie, et quels présidents (héros de la résistance !!), ont séjourné durant plusieurs années sur nos terres:les anciens présidents feu HaouariBoumédienne à Ghardimaou et l’ancien président feuChedli ben Jedid à Ain Soltane.Chaque stèle, de forme pyramidale, porterait, sur chacun des trois côtés une plaque en arabe, en français et en anglais avec, par exemple, l’inscription, très simple, suivante :* C’est dans cette zone que séjourna une Unitéde l’Armée de Libération Nationale Algérienne du…..au 5 juillet 1962 où elle a trouvé toute l’aide et l’assistance du peuple et du gouvernement tunisiens*. Un fléchage peut être mis en place sur les routes principales de la région pour indiquer aux visiteurs tunisiens, algériens et étrangers, l’itinéraire à suivre pour les aider et les encourager à s’y rendre pour les visiter et se recueillir sur ces sites.
En fait, ce sont pareilles pierres ou stèles, telles ces ruines de Kerkouane,de Carthage,de Dougga,par exemple, qui sont la preuve tangible nous confirmant que les Phéniciens, les Carthaginois et les Romains ont séjourné,durant des siècles, dans notre pays en y laissant quelques traits de leur civilisation séculaire. Aussi, les stèles proposées auront une valeur inestimable dans cinquante ans, un siècle et plus encore car leur présence suscitera, auprès des historiens, ou des citoyens beaucoup de curiosité pour les pousser à faire des recherches et étudier l’histoire de leur pays en vue d’être bien informés et trouver les énigmes, les évènements ou lesfaitsqu’ilsreprésentent.
La réalisation de ses diverses stèles qui sont destinées à démontrer aux générations futures la participation de leurs aïeux, au cours du 20°siècle, dans l'effort de développement économique et social , particulièrement dans les zones reculées, désertiques ou sahariennes,et dans la solidarité maghrébine durant les guerres d'indépendance. La concrétisation de ces ouvrages doit être effectuée tant que certains des acteurs et témoins de ces activités ou événements historiques sont encore vivants. Si on continue à faire la sourde oreille à pareille proposition, comme ce fut le cas par le passé récent, alors il sera trop tard et l'histoire de notre pays aura perdu un pan non négligeable de son existence. Espérons que les gouvernants post révolution seront plus réactifs que ceux de la 1°République.
Que Dieu garde et protège la Tunisie Eternelle, l’héritière de Carthage.
Colonel Boubaker ben kraiem
Ancien Sous-Chef d’Etat- Major Armée de Terre,
Ancien Gouverneur.
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